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23 mars 2007 5 23 /03 /mars /2007 13:12

  

 La

rivière serpente dans la campagne, venue du haut pays, celui de « Jacquou le croquant », elle a longtemps servi de trait d’union entre les bûcherons de la montagne, les vignerons de la plaine et les marins de l’océan. Mêlant tout au long de son parcours le parfum des truffes et l’odeur sucrée des vendanges, elle a vu l’homme de Cro-Magnon, assisté à la guerre de cent ans, connu les maquis. Gardienne des confidences, témoin de vies, elle coule depuis la nuit des temps. Les gabarriers ne remontent plus jusqu’à l’estuaire, finis les rêves lointains. 

Lui, dans sa barque, se laisse dériver au fil de l’eau. Depuis toujours l’homme connaît le fleuve. Les galets ont enchanté son enfance, les promenades en canoë ont rythmé son adolescence et si sa vie adulte l’en a éloigné, chaque été le ramenait sur ses berges. Le voilà à la retraite, en ouvrant ses fenêtres le matin, de retour au pays, il contemple le cours d’eau, salue le héron qui a élu domicile sur l’autre rive.

 

Elle est née à quelques kilomètres de là, sur les coteaux. Fille d’agriculteurs, elle s’est mariée avec un propriétaire de la vallée. L’eau c’est la vie, quand la terre craquelle avec les chaleurs de l’été, la Dordogne permet l’arrosage salvateur. Toute sa vie elle en a surveillé le débit, s’angoissant quand une inondation menaçait, s’inquiétant quand les rives s’asséchaient. Encore aujourd’hui, la vieille femme observe, épie les changements.

 

Eux, ils la découvrent. Sur les traces de leurs ancêtres, ils viennent visiter la région qui fut terre anglaise il y a quelques siècles. Comme beaucoup de leurs compatriotes, attirés par la douceur du climat, le souvenir des conquêtes passées oublié, ils sont deux gamins insouciants, désireux d’occuper au mieux un jour de vacances.

 

Elle, lui, ils maugréaient quand ils entendent cette langue qu’ils ne comprennent pas.

 

Ce matin, il est monté dans son véhicule et a rejoint son bateau amarré au port sur l’autre rive, pour une partie de pêche. Son grand chapeau sur le crâne pour se protéger du soleil, les cannes et les appâts embarqués pour occuper une matinée tranquille sur l’eau.

Eux, ils ont programmé une partie de kayak. A la base nautique, ils en ont loué deux et ont bien l’intention de s’amuser sans limite. Equipés de gilets de sauvetages, bons nageurs, ils n’ont pas peur de l’eau et se sont fait déposer en amont.

La mise à l’eau se fait sans encombre et ils entament aussitôt une course poursuite.

Ils ne sont pas seuls, d’autres embarcations se laissent dériver dans le courant. Leurs compagnons veulent profiter d’une journée bucolique. Cris joyeux, saluts se font entendre. Ils se lancent un premier défi : atteindre les cygnes qu‘on aperçoit un peu plus loin dans l’herbe. Pagaie à droite, pagaie à gauche, maintenir le cap, droit au but !

Des gerbes d’eau éclaboussent les concurrents qui n’en ont rien à faire. Ils se doublent et se redoublent, le match est serré. Ils foncent sur les volatiles. Les femelles entourent leurs petits, un male écarte les ailes et se dresse menaçant vers les imprudents.

Un peu effrayés malgré leurs rires fanfarons, les jeunes s’éloignent. Une barque va devenir leur prochaine cible.

Le pêcheur appâte, lance son fil et les yeux fixés sur son bouchon, attend la touche.

Il entend les cris mais les canoës passent de l’autre côté et sans méfiance il poursuit sa rêverie. Voici que déboulent sur lui, les deux garçons, bien déterminés à gagner l’épreuve ! La partie de pêche est compromise, inutile d’espérer une friture d’ablettes, il relève son fil avant que les chenapans ne cassent le matériel.

   -   Vous ne pouvez pas passer au large !

   -   Hello sir ! Where are fishes ? Poisson?

L’homme, grognon, n’a guère envie de commencer une conversation. Il range son matériel et rejoint son véhicule

 

Sur le parapet surplombant la rivière, accoudée à la balustrade, la grand mère a suivi la scène. Ces jeunes ne respectent rien et se croient tout permis ! A petits pas, elle poursuit sa promenade, en compagnie de son chien, qui trottine à côté d’elle.

Les deux garçons ont ramené les kayaks, enfourché leurs vélos et pris le chemin du retour.

 

Les bas côtés sont étroits, elle marche tenant fermement la laisse du caniche qui folâtre dans les hautes herbes. Crissement de pneus, dérapages incontrôlés, contrôlés, les cyclistes font un arrêt brusque derrière elle. Si brusque que l’un d’eux a chuté !

   -   Vous avez failli écraser mon chien ! Mais…vous vous êtes fait mal ?

Attention ! Une voiture ! Rangez-vous !

L’automobiliste s’arrête, craignant un accident. Ils se retrouvent tous sur le parking. Les jeunes extraient de leurs poches des biscuits et apprivoisent l’animal et sa maîtresse.

Plus bas, la rivière coule, indifférente…

 

Demain, ils se reconnaîtront, se salueront…

Hello ! Hello ! Une caresse au chien, un mot gentil à la vieille dame…

Appuyée à la main courante, elle saluera le pêcheur qui reprendra sa promenade interrompue !

  

 

 

 

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21 mars 2007 3 21 /03 /mars /2007 16:25
 
    
    Long ruban d'asphalte qui traverse l'Afrique du nord au sud : Tanger- Le Cap, la  transsaharienne qui autrefois partait d'Alger et traversait le grand désert, s'est, pour des
raisons sécuritaires, déplacée vers l'Ouest.
        
Le Maroc est le premier pays traversé. Plus accessible à tous par le détroit de Gibraltar franchi en une heure, il accueille les touristes avec son hospitalité légendaire. Il y a une quarantaine d'années, les visiteurs ne s'aventuraient guère après Goulimine. Porte du désert, ancien marché caravanier, la cité fournissait suffisamment d'exotisme : ville des hommes bleus, marché aux dromadaires, premières dunes. Au-delà, l'ancien Sahara espagnol, en rébellion contre le gouvernement du pays, n'était pratiquement pas accessible : le souvenir des razzias contre les avions de l'aéropostale : encore présent, et les mines du polisario : une réalité.
Au début des années 70, Ifni, redevient marocaine et la présence espagnole n'est plus qu'un souvenir ! Puis il y eut « la marche verte », les tentatives de conciliation et la construction d'une route pour intégrer les nouveaux territoires. Tantan fut pendant quelques temps l'ultime étape. Les nombreux contrôles de police, les débris de véhicules brûlés, suffisaient à décourager les intrépides qui désiraient poursuivre..
Pourtant une richesse attirait les vacanciers : la pêche.
 
On murmurait que depuis ces falaises qui, des kilomètres durant font un trottoir à l'Atlantique, on remontait d'énormes bêtes des profondeurs de l'océan. Il fallait y aller voir, tenter sa chance et à son tour arracher une belle proie aux flots tumultueux.
 
 
Le manque d'approvisionnement en eau potable, distribuée par citernes et utilisée chichement, limitaient les téméraires. Mais, à leur retour, leurs récits, les photos de leurs prises créèrent des envieux qui de plus en plus nombreux osèrent aller de plus en plus loin. Les sars y dépassaient trois kilos, les courbines battaient records supérieurs à quarante kilos et dans les criques battues par les vagues, les loups dansaient dans l'écume.
La réelle pacification de la région la rendait plus attirable.
Layoune, capitale du Sahara occidental se développa, Dakla, ancienne « Villa Cisneros », garnison militaire, subit une invasion pacifique !
Rien n'était prêt pour accueillir les nouveaux nomades : pas d'électricité, peu d'hôtels, et un climat rude. Les vents de sable fréquents, la pauvreté des lieux, blés et pâturages sont tributaires de la pluie, limitèrent les voyageurs et seuls les « accros » du hameçon acceptèrent des séjours prolongés.
 
 
 
L'homme veut toujours aller voir plus loin et plus loin il y a la Mauritanie puis le Sénégal!
La route par l'Algérie, la traversée du mythique Tamanrasset, l'arrêt au pied de l'arbre du Ténéré, étant désormais difficile, la médiatisation du rallye Paris Dakar et l'explosion du marché du quatre-quatre, ont crée les conditions de nouvelles équipées.
Que vont-ils chercher ces explorateurs du XXI° siècle ?
Les véhicules sont tous équipés de GPS et de toutes les innovations possibles, la route est goudronnée jusqu'à Dakar, des relais accueillent ces « raideurs ».
Les gérants de ces auberges, les premiers à prévoir cet essor, se préparèrent à accueillir un tourisme nouveau. Ici on restaure un ksar, là on en construit un, ailleurs on aménage un campement dans une oasis ou on bâtit un restaurant. Le bouche à oreille fonctionne et ces installations nouvelles deviennent des étapes obligatoires
 
 
On y voit des vélos, des motos ou des tout terrains. Les solitaires, les couples ou les groupes partent à l'assaut du désert . Ils « font » le Sahara et dédaignent le goudron pour s'offrir des sensations. On entend le soir au bivouac leurs histoires :
-         panne sur la voie ferrée du train du désert qui transporte de Zouerate à Nouakchott, le minerai de fer.
-         ensablement sur la piste qui longe l'océan, et qui est recouverte par marée haute !
-         passage mouvementé de la frontière mauritanienne,
mais aussi :
-          un thé sous la tente sarahoui,
-         un guide improvisé, surgi de nulle part, qui les a aidés à se diriger.
et dans leurs yeux, brille le souvenir d'une aventure dans des lieux inoubliables.
 
 
Séjourner dans une de ces haltes est source de rencontres insolites :
 
Les Hollandais remontent vers le nord à bicyclette, bien moins fatigant que la marche à pied selon eux. Le pèlerinage à Compostelle, qu'ils ont fait précédemment, les a épuisés, mais la remontée du Magrheb, le franchissement des Pyrénées, une source de plaisir si on choisit la bonne saison !
Lui, l'Italien, descend à moto jusqu?au Cap en solitaire et la compagnie lui manque déjà !
Eux, les Portugais, font cinq à six fois par an le voyage vers la Gambie. Chacun conduit une voiture qui vendue là-bas apporte le bénéfice, un fourgon d'assistance assure la maintenance et le retour .
Un groupe de jeunes français a découvert ce besoin du marché africain. Ils convoient automobiles, camions, fourgons remplis de pièces mécaniques de récupération et au hasard des villages vendent leurs trésors. Ils iront jusqu'à épuisement du stock, le Mali peut-être le Burkina Fasso !
Si les transactions sont fructueuses, ils recommenceront. L'Afrique est miséreuse, elle reconditionne « nos poubelles » et fait du neuf avec du vieux. Les rêves de fortune sont souvent déçus, les aventureux ne gagnent qu'une misère sur la misère. Ils rentrent la tête emplie de souvenirs d'un ailleurs différent. Les convois humanitaires sont légions. déshérités.
 
Ainsi va le monde et dans ce pays de tradition nomade, personne n'est étonné de voir et de revoir des individus dont on ne sait s'ils vont ou s'ils reviennent !
Comme les Touaregs qui courent à la poursuite des nuages, signes de pluie donc de récolte, ils traquent la bonne affaire.
 
 
Le poisson se raréfie mais le nombre de cannes augmente.
Sur les falaises, dans les abris construits avec des matériaux de récupération, il y a de moins en moins d'autochtones ( le métier ne nourrit plus la famille) et de plus en plus d'européens qui stationnent leurs véhicules de loisir. Avec la saison des frimas, comme les flamants sur la lagune, ils se posent et se rassemblent. Il y a les « anciens », forts de leur antériorité, et les nouveaux qui espèrent!.Ils échangent leur connaissance des lieux, des bons postes. Le troc, parfois la vente et souvent les dons permettent d'écouler les prises abondantes . Une coopération se développe, des amitiés se construisent.
 
Voyant cette affluence, les projets de campings se multiplient.
 
Dans les villages, les échoppes fournissent l'indispensable, les cafés restaurants assurent le couvert aux passagers des camions qui descendent vers le sud ou en remontent le poisson, source nouvelle de profit. Les touristes sont les bienvenus, ils apportent un peu d'argent. L'électrification est en marche, internet suit, les conditions sanitaires s'améliorent. Le respect de l'environnement commence à devenir d'actualité.
 
Le vrai désert n'est pas loin.
Les pistes, permettent d'atteindre des endroits moins fréquentés. Des campements berbères s'égrènent sur les étendues rocailleuses, des chèvres broutent les brins de verdure vestiges de la dernière pluie et les dromadaires qui ne sont plus que bêtes à viande arrachent les touffes de buisson épineux entre les rochers.
Les femmes préparent les repas, les hommes au volant de véhicules qui n'ont plus d'âge assurent l'approvisionnement en nourriture et en eau, les enfants quand ils ne gardent pas les troupeaux vont à l'école à une dizaine de kilomètres.
   
 Fuir la civilisation ou s'éloigner de régions où il est de plus en plus difficile de survivre, tel est le paradoxe.
 Les européens arrivent en masse et les africains rêvent de notre continent. Ils espèrent trouver l'Eldorado, mais la mort est parfois au bout du voyage.
Les Canaries sont proches, les atteindre, franchir l'océan dans des barques de pêche, est entreprise à risques. L'Atlantique les rejette sur la grève et engloutit leurs rêves dans ses profondeurs.
    
 
Et sur la route, l'interminable flot de camions se poursuit, jour et nuit, pour écouler le produit de la pêche, source nouvelle de profit .
 
 
 
Sur la mer, les goélands planent en jacassant . Ils surveillent la côte, attendent le départ des hommes pour récupérer quelque pitance abandonnée sur les rochers.
 
 
 
Au large, survolant les vagues, les oiseaux migrateurs, partent eux aussi à la recherche d'un hivernage plus accueillant.
 
                                                                Nic
  
 
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19 mars 2007 1 19 /03 /mars /2007 17:38
  
 
 
 
 
 
 

Elle s’appelait Amina.
Petite fille brune, gaie, aux longs cheveux nattés,
elle vivait dans un village, 
niché au creux de la montagne
dans ce pays si beau, si sauvage
et pourtant si pauvre .
On se serait cru sur une autre planète,
dans un autre monde.
Ici, la vie était simple,
 réduite aux nécessités premières,
le feu, la terre, l’air et l’eau,
les quatre éléments qui influençaient la vie.
 
Le feu venait du ciel, le soleil dardait des rayons
dont il fallait se protéger :
hommes, plantes, animaux,
tous le craignaient !
Et pourtant, à l’ombre ou le soir, il faisait froid,
Ce qui faisait dire aux gens :
nous habitons un pays froid où le soleil est chaud !
 
La terre ocre, sableuse et rocheuse,
pouvait être fertile
quand la pluie décidait de tomber.
Hélas ! elle était plus souvent sèche,
et le sol se fendillait.
 
L’air pur, le ciel bleu et les nuits étoilées
promettaient une liberté
mais seuls en profitaient
les oiseaux migrateurs
en route pour leur hivernage.
 
Quand à l’eau, source de vie,
elle était présente et absente.
Partout on entendait le grondement de l’océan,
ses puissantes vagues
qui claquaient contre les rochers.
Mais cette eau là, salée
pouvait être ennemie.
Heureusement, il y avait les sources, les puits.
 
Il fallait, tous les matins
harnacher l’âne, le charger de bidons
et aller faire provision d’eau douce.
Amina aimait cette corvée
qui n’en était pas une pour elle !
Rêveuse , elle partait, chaque jour,
 pour une promenade enchantée !
Tout était prétexte à joie et bonne humeur :
Un oiseau sur une branche poussait sa chansonnette,
un bouvier roulait sa bille,
un lézard gecko à gorge verte
 s’enfuyait à son approche !
Et depuis peu, son secret !
Une chienne l’attendait sur le sentier,
 Elle lui apportait un morceau de pain.
Chienne, couleur de sable
qui jappait à son approche,
Chienne sauvage,
qui s’était laissée apprivoiser
sans difficulté.
Elle ne pouvait la ramener au village,
il n’est pas dans les coutumes
d’avoir un animal pour le plaisir !
Alors chaque matin,
Amina glissait un croûton
dans sa poche
et allait vers son rendez-vous !
Chaque matin, Aziza,
c’est ainsi qu’elle avait nommé l’animal,
 l’attendait et l’accompagnait.
Elles se connaissaient depuis quelque temps
et la chienne lui faisait fête !
Elles jouaient ensemble.
 
Amina, n’était pas peureuse,
Et se sentait en sécurité auprès d’elle.
Quand les garçons s’approchaient
 pour la taquiner
Aziza montrait les dents
et tous s’enfuyaient !
Au village, ni ses parents, ni ses frères,
 n’étaient au courant de cette relation.
Comme tous, ils avaient peur des chiens,
qui souvent transportent la rage et sont dangereux.
Un jour, moins attentive que d’habitude,
perdue dans ses pensées,
elle ne vit pas,
 sous la pierre
qui avait roulée sous les sabots de l’âne,
le scorpion qui dressait sa queue,
et se croyant menacé
 piqua la cheville de la petite fille.
Elle poussa un cri de douleur.
 
Aziza apparût et lécha la jambe de l’enfant
qui ne pouvait marcher.
Une conversation inaudible eut lieu,
D’un seul regard la petite fille et l’animal se comprirent.
Aziza mordillant les mollets de l’âne,
lui aboyant aux flancs,
 le ramena au village.
Voyant arriver l’animal, les bidons vides,
sans la petite fille,
 tout le monde s’inquiéta.
La chienne aboya tant et tant,
 que le père d’Amina la suivit.
 
Il trouva sa fille, assise sur une pierre,
la prit dans ses bras et la porta au village.
Le guérisseur lui appliqua des herbes
soigneusement choisies,
la chienne la consola
et quelques jours plus tard,
l’enfant put reprendre ses promenades.
Mais quelque chose avait changé !
 
Aziza, devenue sa protectrice,
était connue et adoptée par tout le village.
Désormais elle pouvait circuler librement.
Tout le monde
 la connaissait, la nourrissait et la choyait !
Mais ce qu’elle préférait par dessous tout ,
C’était se faufiler sur le lit d’Amina
et se lover contre elle,
Afin que nul n’approche !
Personne n’osait la chasser :
N’était-ce pas grâce à elle
qu’Amina avait pu être sauvée
du poison de la bête maléfique!
 
La chienne et l’enfant
 poursuivirent longtemps
cette amitié
si peu commune
dans cette oasis du désert !
 
Nicole
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 
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13 mars 2007 2 13 /03 /mars /2007 13:21
MIRAGE OU REALITE ?
 
 
 
Il y avait dans cette vaste étendue désertique un étrange animal.
D’où venait-il ? Tous l’ignoraient. Il errait mélancolique, cherchant vainement sa pitance entre les cailloux qui jonchaient le sol. Une belle et étrange histoire d’amour avait permis sa venue au monde. Hélas, la suite, comme vous allez le découvrir, n’inspirait que tristesse et remords.
 
Une ânesse était née dans un village du grand sud niché dans les montagnes de l’Atlas, une région pauvre, aride, où la vie est une lutte perpétuelle. Quand les pluies, si rares, tant espérées, permettaient d’envisager les semailles, elle tirait la charrue. Tous les soirs les enfants la chargeaient de bidons et, par le sentier qui serpentait dans la colline, la menaient au puits. Ployant sous la charge elle ne pouvait se dérober au pénible retour : armés d’une pique, ses conducteurs, la houspillaient sans arrêt. Elle avançait tête basse, lentement mais prudemment, espérant un picotin d’avoine en paiement de son travail. Une pierre qui roule et c’est la chute, la pente était raide et le chemin escarpé.
 
 Dès l’aube, le lundi, jour de souk, la famille s’entassait dans la carriole et la promenade se déroulait suivant un rite immuable : pas question de flâner, trot de rigueur, le fouet prêt à  claquer si le rythme ralentissait. En bordure d’un champ, envahi par une foule bruyante et active, elle retrouvait ses congénères et tous attendaient la fin des festivités, entravés mais libres de papoter. La convivialité des ânes est légendaire, ils aiment la compagnie de leurs semblables. Sa mère y avait rencontré l’élu de son cœur, bientôt, elle aussi aurait un ami, et fonderait un foyer.
Le destin devait en décider autrement !
 
En revenant de la corvée d’eau, elle trouva, couché dans son étable, un compagnon inattendu: un dromadaire ! Le paysan l’avait acheté, le matin même, à une caravane qui terminait son ultime voyage.Le camélidé, connu depuis l’antiquité pour ses capacités à tirer l’araire, serait parfait pour défricher la terre fraîchement acquise dans des lieux inhospitaliers.
Le lendemain, attelés de concert, ils s’efforcèrent de tracer un sillon, le plus droit possible, dans un sol rocailleux à flanc de montagne.
Fatigués, fourbus, après avoir accompli leur rude labeur, ils retrouvèrent leur litière pour une nuit de repos. Une amitié, une tendre complicité s’établit entre eux.
Dame nature nous réserve parfois des surprises !
Les savants, depuis longtemps, jouent à l’apprenti sorcier dans leur laboratoire, manipulent les gènes et mélangent dans les éprouvettes les semences sélectionnées. Ils seraient bien étonnés s’ils apprenaient que dans une remise, naquit, douze mois plus tard, un être hybride. Eux qui après de multiples tentatives, n’ont réussi à produire que deux camas, mélange d’un guanaco et d’un dromadaire.

 
 Un braiment de joie rompit le silence de la nuit pour saluer sa venue.
Le papa très fier, blatéra de satisfaction. A genoux il ne se lassait pas d’admirer sa progéniture.
Le maître des lieux, interloqué, cherchait en vain une explication à cet enfantement.
Les enfants accoururent, caressèrent la petite boule fragile qui tentait de dresser ses pattes flageolantes. Personne, ce jour là n’examina attentivement le nourrisson, il eut donc la vie sauve. Affamé, il téta goulûment la mamelle qui s’offrait à lui.
 
Pris par leurs occupations, peu enclins à s’attendrir devant les évènements de la vie, somme toute bien naturels et ne nécessitant pas d’attention particulière, les habitants du logis laissèrent mère et bébé faire connaissance. Si le nouveau né survivait, il serait temps de prendre une décision, dans le cas contraire, on attendrait la prochaine naissance.
 
Quelque temps plus tard, abasourdi, l’agriculteur observait « la chose ».
Elle gambadait autour de sa mère, folâtrait dans l’herbe derrière la maison. Par la porte restée ouverte, les senteurs printanières les avaient attirées à l’extérieur. Couché dans la paille, le dromadaire regardait son rejeton avec fierté, mâchonnant consciencieusement son brin de verdure.
 
Etait-il devenu fou ? L’homme se frotta les yeux, écarta une mèche rebelle, non il ne rêvait pas, elle broutait là devant lui. En silence, de peur d’alerter les voisins, il avança prudemment vers le couple. Troublé, il n’osait les toucher !
De loin on pouvait croire à un petit ânon, la couleur, les oreilles sans cesse en mouvement, oui, c’était bien l’héritage maternel. Mais son dos ? Cette excroissance, cette bosse, qui se balançait de droite à gauche, comme un sac vide ?
Et son museau ? La lèvre supérieure fendue, une haleine à faire fuir le plus intrépide des curieux, sa mâchoire allait et venait, ne réussissant pas à conserver les grains d’avoine que sa mère lui désignait.
Sa queue ? Longue, balayant le sol et munie d’une ridicule touffe de poils à son extrémité !
 Regardant furtivement si quelqu’un pouvait apercevoir ce qui se passait dans son jardin, le fermier se désolait.
 Une catastrophe ! Il deviendrait la risée du douar si la nouvelle se répandait !
Il fit rentrer les animaux dans l’étable, ferma soigneusement la porte à clé et s’en fut dans le djebel pour réfléchir.
L’angoisse s’empara de lui. Il ne se souvenait pas d’avoir insulté un djinn, ni blessé un marabout qui aurait pu lui jeter un mauvais sort.
Quel péché avait-il commis ?
Assis sur un rocher, à l’ombre d’un figuier, la tête entre ses mains, ses pensées se bousculaient : comment résoudre une telle situation sans se couvrir de ridicule?
Seuls les siens s’inquiéteraient de la santé du nourrisson. Il eut un geste de dépit ; la naissance avait suscité un espoir : une prochaine rentrée d’argent, fruit de la vente, aurait amélioré les maigres revenus de la propriété. Feindre une maladie pour écarter les visiteurs serait facile, il ne fallait pas contaminer le reste du cheptel, chèvres et moutons devaient être protégés.
Mais que faire de cet énergumène ?
Le laisser dépérir était hors de question : les forces occultes, sûrement à l’origine de cette histoire, n’apprécieraient pas. Ignorant les raisons de cette punition - si punition il y avait- il devait prendre des précautions et éviter de nouveaux ennuis.
La saison des récoltes approchant, il serait aisé d’habituer le petit à une absence progressive de ses compagnons, le temps du sevrage serait long, mais l’enclos protégé par une haie de figuiers de barbarie le soustrairait aux yeux de la collectivité.
 
De retour à la maison, il se cacha pour voir une nouvelle fois l’objet de ses soucis.
Mi âne, mi chameau, les doux yeux de maman, le rictus de papa ; cette moue dédaigneuse qui lui donne l’air de sourire avec condescendance, une facétie de la nature, pensa-t-il, mais il n’appréciait pas le comique de la situation !
Serait-il têtu, capricieux ? Aurait-il la résistance du vaisseau du désert ?
Trotterait-il, ou marcherait-il à l’amble, donnant le mal de mer à celui qui le monte ?
Saurait-il baraquer pour charger son cavalier ?
Perdu dans de sombres pensées, son épouse le surprit.
Apercevant la créature, elle poussa un hurlement de terreur. La différence fait peur !
-   C’est un monstre !
-   Voilà le rejeton de notre ânesse ! La honte est sur notre famille !
 
Partager son tracas soulagea son fardeau. Son visage se détendit, ils décidèrent de garder le silence et de remettre à plus tard la recherche de la solution. Le sommeil, source de réconfort apporterait peut-être une réponse à leur préoccupation.
Las, leur air de conspirateurs les trahit ! Les enfants eurent vite fait de découvrir la cause de leurs allées et venues à l’étable et malgré l’interdiction formelle d’y entrer, ils s’y retrouvèrent tous, un soir, autour de celui qui y avait vu le jour.
 
La rumeur se répandit dans la région, on cachait un étrange phénomène chez Ali !
Dieu est le créateur de toute chose vivante, il faut respecter sa volonté, ne pas chercher à comprendre, mais……
Maléfice ou bon présage ? La différence tient parfois à peu de chose :
Que vienne la pluie, que les récoltes soient abondantes, on le remerciera.
Que la sécheresse se prolonge, que les nuages de criquets dévastent les champs de céréales, on chassera sans ménagements celui qui sera jugé responsable !
 
Pendant plusieurs mois, on vint de loin voir « le drom’âne », le toucher, le caresser, lui porter de l’herbe fraîche.
Il grandissait, prenant à l’un ou l’autre de ses parents quelques traits de caractères. Son aspect physique intriguait, repoussait parfois, mais ne laissait pas indifférent. Ses grognements peu mélodieux amusaient les enfants. Il faut reconnaître que ni papa ni maman n’étaient des chanteurs appréciés !
Cela ne pouvait durer, la chance tourna, les jours de bonheur laissèrent place à la méchanceté ou à l’ignorance.
Une clameur s’éleva dans la chaleur de midi : les mauvais esprits avaient frappé ! Le bouc du troupeau voisin venait de rendre l’âme sans raison apparente.
La terreur fut à son comble quand une brebis s’effondra.
Le malheur ne pouvait venir que de « la chose », il fallait l’éloigner ! Les femmes se répandirent en lamentations, les paysans s’armèrent de gourdins et se dirigèrent vers le misérable. Dans cette frénésie qui gagnait, une voix s’éleva : ne pas le tuer, l’envoyer loin vers ces étendues sans fin dont on ne revient pas !
 
La bête fut poussée, huée. Les clameurs hostiles l’accompagnèrent dans son exil. Elle prit la fuite pour échapper à ses poursuivants hystériques. Parvenue bien au-delà des confins du bled, elle huma l’air et se reposa. Quelques touffes d’épineux calmèrent sa faim. Sa sobriété, héritage de papa, lui permit d’attendre des jours meilleurs et de préparer une vie d’errance.                                                             Sa vie s’organisait dans les steppes rocailleuses quand … une caravane s’arrêta près de la source où il s’abreuvait. En entendant le sable crisser sous les pas des nouveaux arrivants, le drom’âne s’était plaqué contre la falaise cherchant refuge dans une anfractuosité. A nouveau les regards de méfiance, de curiosité, vite remplacés par des cris d’allégresse.
Traité comme une merveille de la création, il accompagna les nomades, reçut sa nourriture, participa aux corvées de transport. A chaque halte on l’entourait de soins et les enfants jouaient avec lui. Devenu membre de la troupe, il coula des jours heureux.                                                                       Le vent chaud du désert transmis la nouvelle de son union avec une belle chamelle. Une année plus tard, comme dans un conte de fées, il eut la joie d’accueillir un chamelon, blanc, qui devint porte bonheur de la tribu.                                                                                                                                 Ainsi va la vie dans un monde tantôt cruel, tantôt généreux.
 
 
Nic   2 avril 2003
 
 
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11 mars 2007 7 11 /03 /mars /2007 18:13

 
 
 
 
 
                                              
Quand j’ai dit aux enfants, que je partais dans le désert, ils m’ont dit :
- S’il te plait, si tu rencontres le petit Prince,
 demande lui….
Demande lui si sa rose est toujours capricieuse,
Si le mouton ne s’est pas échappé,
Si les baobabs n’ont pas envahi sa planète…
Mais surtout, ne le laisse pas repartir, qu’il ne rejoigne pas le serpent, qu’il pense à son ami le renard….

Désert de sable, paysages de dunes, mais point de Petit Prince !
 
Un aviateur réparant son avion tout seul dans le sable ?
Seuls quelques aventuriers se lancent à la poursuite de records !
Ils ne partent plus dans l’inconnu et sont munis de leur GPS !
En cas de panne, la balise Argos serait déclenchée,
 les secours à sa recherche.
Peut-être aurait-il eu le temps d’apprendre à dessiner un mouton ?
Mais point de bonhomme blond pour l’adopter !
 
Heureusement, les avions sont éprouvés,
 ils transportent chaque jour des centaines de passagers
qui traversent l’Afrique du Nord au Sud ,
Et vont en Amérique sans escale !
Cap Juby est devenu Tarfaya,
et les avions qui la survolent passent très haut dans le ciel !
                                                                                                               
Le désert a bien changé !
 
Petit Prince, entends-tu ces grondements dans le lointain ?
Des caravanes de dromadaires, non point …
Des monstres gris, tous semblables,
 on les appelle des quatre-quatre !
Ils traversent le désert à toute vitesse.
 Quelquefois celui-ci se révolte,
 le vent souffle, et la dune se déplace,
 le sable recouvre la route !
Il faut alors prendre la pelle et dégager un passage.
Des files de camions sillonnent cet espace et ravitaillent les nomades.
 
 
Les dromadaires ?
Petit Prince, regarde-les sur le bord de la route,
 ils raclent le plus petit brin d’herbe qui pousse
dans cette étendue immense, baillant d’ennui,
ils ignorent le code de la route et traversent sans un regard
 à droite ou à gauche !
Les as-tu rencontrés, Petit Prince , ces vaisseaux du désert ?
As-tu essayé de les apprivoiser ?
T’ont –ils raconté leur vie d’avant ?
 Au temps où ils traversaient le Sahara, chargés de plaques de sel ?
 
Mais Petit Prince, où te caches-tu ?
Pourquoi ne te montres-tu pas ?
Sais-tu que le monde a besoin de toi ?
Voudrais-tu nous apprendre à ne voir que l’essentiel ?
 
Toi, qui sais que les grandes personnes sont trop sérieuses,
reviens pour les enfants,
ils connaissent ton histoire,
ils voudraient t’apprivoiser et devenir ton ami.
 
Ils te raconteront que le savant a travaillé,
il a trouvé……
peut-être que ce n’est pas lui !
 c’en est un autre, mais c’est sûrement un savant !
il a trouvé, tu sais quoi ?
Il a inventé une machine, on appelle ça… une fusée,
 pour aller dans l’univers !
Tu pourras, aller et venir entre Terre et ta planète !
 
Il y a toujours sur notre Terre, des vaniteux,
des rois qui veulent se faire obéir,
des businessmen,
mais plus du tout d’allumeur de réverbères !
 quel dommage !
On a découvert le courant électrique !
Maintenant on appuie sur un bouton et la lumière jaillit !
Beaucoup moins poétique
 mais tellement plus pratique !
Le mathématicien n’a plus de travail !
Grâce à son ordinateur, il sait, combien il a d’étoiles,
La machine garde en mémoire ses calculs et ses opérations !
 
Après avoir rêvé de ce petit bonhomme,
je l’ai cherché mais par où commencer ?
 
A l’heure d’Internet, le Petit Prince ne s’est pas connecté !
 
A droite, à gauche, au nord ou au sud, des dunes !
J’attendrais donc la nuit,
 pour apercevoir son étoile,
Une pensée au coucher du soleil,
 peut-être est-il derrière une dune ?
 
« L’essentiel est invisible pour les yeux »
 a-t-il dit,
 il est sûrement là-bas,
 ou ici,
 mais je ne l’ai pas trouvé !
 
 
                                                                              Nicole 
 
               
 
 

 

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